Aérées

De l’air dans la tête à Pasteur

 

 

 

 

 

“Pasteur, Une longue histoire”

Vidéo du premier projet lors du centenaire de l’institut Pasteur. Collaboration avec 3 élèves de l’école des Beaux arts de Besançon (25) en 1987
                                                                                                                            

https://Pasteur une longue histoire

 


“De l’air dans la tête de Pasteur “

 1- « Une tête bien pleine » peut-elle être sujette aux courants d’air ?                          

La matière grise du cerveau de Pasteur est hyperactive. Esprit vif, en perpétuel questionnement, il oscille entre doutes et satisfactions. L’air tourmenté de sa boite crânienne symbolise l’hyperactivité de sa bouillonnante matière grise.

Cet air est avant tout celui qui nous maintien en vie: celui qui nous environne et que nous respirons. J’ai choisi ce fluide essentiel car il est un élément actif dans ses recherches comme dans mon expression plastique. Il a été pionnier en prouvant que l’air joue un rôle important dans la biologie, car il transporte des germes et des micro-organismes, comme agents de contagion. Ce titre interpelle sur la position transversale et novatrice du savant : ne démontre-t-elle pas que Pasteur posait les bases du concept de la pollution en différenciant les qualités de l’air: stérile, souillé et pur ?

2- Art et sciences, quels ont été les motifs de mon intérêt pour le chercheur ?

  • Ce visage barbu, barré d’un regard grave, droit , a su faire face avec courage aux critiques de la corporation scientifique de son époque. Cette détermination se retrouve chez l’artiste qui doit avoir le courage de défendre ses choix plastiques, son parti pris trop singulier, son engagement ou un message inaccessible de prime abord. Excellent pastelliste, il dessine des croquis très précis des installations de son expérimentation. Son sens de l’observation aiguillé lui avait permis de déceler des indices difficilement repérables au microscope  invisibles pour d’autres chercheurs .
  • Comment ne pas être sensible à cet homme qui ayant des affinités artistiques, nous le rend plus humain ? Il partageait les amitiés avec les artistes régionaux qui me sont aussi familiers, comme Auguste Pointelin. 
  • J’ai été également  fascinée par les formes organiques des flacons et ballons en verre soufflé de son laboratoire dont j’ai puisé mon inspiration pour réaliser l’une des sculpture mon installation “Triomphe du ballon col de cygne”.

 « Va prendre tes leçons dans la nature, c’est là qu’est notre futur. »  Léonard de Vinci   

  • Ce que j’apprécie chez le savant, c’est sa curiosité qui le pousse à sortir du laboratoire et à s’interroger sur les échanges entre l’homme et son environnement comme l’artiste puise son inspiration en observant, en faisant des prélèvements (croquis, photographies, annotations) ou en œuvrant “in situ”.
  • Ce qui est encore plus surprenant, c’est sa façon d’élaborer ses recherches. Elles sont similaires au processus créatif car elles obéissent aux mêmes démarches : l’idée ou l’appel à projet, les expériences, les échanges avec autrui, la réflexion, l’intervention du hasard et son exploitation, la création d’outils et de matériels pour étayer ses avancées, et enfin la diffusion des résultats. Les acquis étaient mis à profit et transposés dans les nouvelles missions, tout comme l’enchaînement et l’évolution de la création artistique.

3 -Dans l’installation:                                          

Le noir et blanc sont les teintes de la représentation photographique de l’époque. Il retraduit une rigueur et une sévérité liée à la recherche.                                                          

– Le papier embossé sur des formes de flacons que j’ai inventé ou recomposé à l’identique comme le ballon col de cygne, permet de mieux faire sentir sa présence que le verre soufflé. De plus, le papier retranscrit bien la fragilité de la recherche et parallèlement de nos existences suspendues à ses découvertes. Le travail de reconquête de la prolongation de la  vie sur la mort, se réécrivant sans cesse sur papier. D’ailleurs j’ai volontairement voulu marquer la présence de la mort, en moulant le papier à partir de crânes: humain et de mouton. Au départ, comme sur les flacons de Pasteur,  j’avais envie de mettre des étiquettes d’écoliers, aux angles bizeautés et surlignées de bleu nuit, avec dessus des inscriptions à la plume, mais le regard allait s’attacher à ce détail descriptif, le déroutant du message initial de la sculpture.                                                                                                                                                                                                                                                 – Le miroir symbolise plusieurs éléments: il est “réflexion”, c’est à dire qu’il renvoie une image comme la lentille du microscope. Il donne au regardeur la possibilité d’appréhender la sculpture sous un autre angle, tout comme le scientifique cherche à comprendre un phénomène sous un autre aspect. Enfin “la réflexion” qui est le prolongement de l’observation.                                                                                 – Les cages:  l’une est cylindrique comme le symbole du tube à essai ( pour l’atténuation du claveau) , elle  devient podium ( pour le triomphe du ballon col de cygne) ou encore pyramidale comme tracés des pics de contamination pour les virus et crânes et encore avoir la forme d’un parallélépipède rectangle, comme la boite pour les levures. Le métal blanc des cages rappelle l’asepsie des laboratoires et des lits à barreaux des hôpitaux du XIX ème siècle. La cage pose la question de la circulation de l’air, entre ouverture/ fermeture, l’endogène et l’exogène.  Plus le vide à l’intérieur de la cage est considérable, et plus l’objet est distancié de notre humanité. La forme présentée semble si importante, qu’elle contient l’aura d’une relique, d’une parure, d’un bijou ou d’un précieux élixir au sein de son coffret . Un paradoxe étonnant alors que les sculptures ne sont que de papier.                                                                                                                                                                                                                                                                  -Le coton: Très utilisé dans les laboratoires scientifiques, sa blancheur reste en harmonie avec le papier. Assistant du bouchon de liège, il assure l’étanchéité d’un flacon comme un joint. D’une porosité puissante, il absorbe et retient les liquides…Il est à la fois “le liant” nuageux entre les formes ( le triomphe du ballon col de cygne) il est aussi l’expression de la mousse des levures (anaérobie, levures gourmandes).


 

1–  « Le triomphe du ballon col de cygne »   (L’air canalisé et non tourmenté)  Papier embossé, métal, coton et miroir   80 x 25 cm de diamètre   1862: l’asepsie. Sa découverte va à l’encontre  des thèses en cours sur la « génération spontanée ». Il prouve que l’air renferme des micro-organismes qui se développent et se multiplient. En chauffant le liquide dans le ballon et en faisant un vide d’air, le liquide reste inaltéré. VIDÉO du “making of” https://www.Triomphe du ballon col de cygne

 


 

2- « L’atténuation»  (l’air adjuvant) Ouate de cellulose, encre, métal et miroir .100 x 16 cm de diamètre 1877-1887: immunologie. Pour obtenir un vaccin contre la rage, Pasteur suspendait des moelles de lapins rabiques (infectées) et  les exposait à l’air dans un flacon. Avec le temps, la virulence du virus s’atténue jusqu’à s’éteindre. Une série d’injections de  moelle rabique de moins en moins  atténuée permet est   le succès du vaccin sur le jeune Joseph Meister. VIDÉO  du making of: https://www.l’atténuation


3-  « Rage et charbon » (les contaminations) Papier embossé, rehauts de fusain, métal et miroir 100 x 25 x 25 cm   1877– 1887: Les contagions. Études sur les maladies virulentes en collaboration avec les vétérinaires. Pasteur met à jour les transmissions de la maladie du charbon chez le mouton jusqu’à celle de la rage chez l’homme. Le virus pathogène, qui se multiplie dans le corps et provoque la maladie infectieuse, vient de l’extérieur: terre, l’airLa contagion doit être évitée. VIDÉO  du making of: https://www.La contagion

 


 

4« Levures gourmandes » (L’anaérobie- Oxydation) Papier embossé, métal,   coton, bouchons, sable cristallin 80 x 17 x 21 cm  1856: la fermentation alcoolique est dans la même logique de la théorie des germes. Même privées d’air, les levures de saccharomyces cerevisiae pullulent. Dans la fermentation du vin, ces levures consomment le sucre du moût, elles produisent de l’éthanol et du dioxyde de carbone (alcool). Ce gaz forme des bulles dans la cuve et mousse à la surface VIDÉO du “making of” des fleurs du vin : https://www.les levures